1929 - 1989

La renaissance du film western était arrivé d'Italie ! Un grand merci au regretté Sergio Leone 

Le COLOSSE DE RHODES aka The Colossus of Rhodes aka Il Colosso di Rodi - Sergio Leone avec Rory Calhoun, Lea Massari, Georges Marchal, Conrado San Martin, Angel Aranda, Mabel Karr, Georges Rigaud, 1961, Italie, 128m (145m en Italie, 122m en France)

Dario est un officier de l'armée grecque venu à l'île de Rhodes rendre visite à son oncle en cette année 280 avant J.C. L'île s'apprête à inaugurer une gigantesque statue: "Le Colosse de Rhodes", destinée à défendre l'île de ses ennemis. Mais le jour de l'inauguration, une tentative d'assassinat menée par des rebelles, échoue contre le roi Xerxès. Son premier ministre, Thar, voit là une belle occasion de s'emparer du pouvoir et il fait alliance avec les Phéniciens, ennemis des Grecs. Dario, quant à lui, préfère roucouler avec la fille de l'architecte de la statue, Diala. Il devra cependant choisir un camp alors que la révolte gronde dans l'île. Après plusieurs combats, Dario et les rebelles menés par Périoclès voit leurs chances de faire tomber leurs ennemis s'amoindrir alors que Périoclès et ses hommes sont capturés. Dario n'abandonne pas pour autant et il livre une dernière bataille pour renverser les tyrans alors qu'un tremblement de terre se déclenche dans l'île, pouvant éliminer tous les habitants.

Après plusieurs années où il a fait office d'assistant sur de nombreux péplums italiens et américains, Sergio Leone se voit offrir sa première mise en scène dans le genre. Voulant en démolir les archétypes pour en faire une sorte d'autodafé, Leone s'éloigne des films de colosses héroïques comme Hercule et Maciste pour se servir d'un autre colosse, en l'occurrence la merveille du monde du titre, afin de réaliser un film à grand spectacle rempli d'humour noir et de parodie. Les combats sont nombreux et la violence est tout de même au rendez-vous, mais l'intrigue développe avec décontraction des situations abracadabrantes qui font un admirable clin d'oeil au "NORTH BY NORTHWEST" d'Hitchcock. Le thème de base du complot politique devient donc un joli prétexte pour Leone afin de se moquer de ses personnages, entraînés malgré eux dans une suite d'aventures dont ils ne saisissent pas le sens profond. L'histoire se conclue de façon tout aussi ironique alors que le tremblement de terre qui détruit l'île tue autant les conspirateurs que les rebelles et la populace sans distinction. L'ensemble est impressionnant, mais quelques scènes s'avèrent brouillonnes et témoignent du talent pas encore entièrement abouti du réalisateur. Il n'empêche que ce péplum est bien au-dessus de la moyenne et qu'il faut le voir pour ne pas en croire ses yeux. Rory Calhoun joue avec beaucoup de légèreté, ce qui convient à l'image du héros séducteur, cynique et perdu qu'il incarne à l'écran. Mathieu Lemée

A FISTFUL OF DOLLARS aka Pour une poignée de dollars aka Per un pugno di dollari - Sergio Leone avec Clint Eastwood, Gian Maria Volonte, Marianne Koch, Josef Egger, Wolfgang Lukschy, Daniel Martin, Margherita Lozano, Carol Brown, 1964, Italie, 100m

Un pistolero solitaire arrive un beau matin dans une petite ville située à la frontière du Mexique. Deux familles de bandits s'y livrent une guerre mortelle pour le monopole du trafic d'armes et d'alcool: les Rodos et les Baxter. L'arrivée de l'étranger en ville ne fait pas la joie de tous ces hors-la-loi mais lorsqu'il abat quatre hommes des Baxter qui voulaient l'intimider, les Rodos acceptent de l'engager comme mercenaire. Le mystérieux homme sans nom en profite alors pour aggraver le conflit entre les deux familles afin qu'ils s'éliminent l'un l'autre pendant que lui s'enrichit à leurs dépends. C'est ainsi qu'il enlève Marisol, la maîtresse de Ramon Rodos, le plus dangereux tireur de cette famille pour la donner au Baxter afin qu'elle serve de monnaie d'échange pour libérer des prisonniers. Mais Ramon et les Rodos ont découvert son petit manège et après l'avoir sauvagement battu, ils vont éliminer définitivement tous les membres de la famille Baxter. L'homme sans nom parvient cependant à s'échapper et après s'être remis de ses blessures dans une cachette sûre, il réapparaît au village pour régler leurs comptes à Ramon et au reste de la famille Rodos tout en libérant Marisol.

Ce film de Sergio Leone, le premier de sa fameuse trilogie des "DOLLARS", n'est pas, contrairement à ce que certains pensent, le premier western européen ou italien car il y en eût bien d'autres avant celui-ci. Mais l'énorme succès du film et le style de mise en scène de Leone ont cependant posé les bases de ce qu'allaient être les ingrédients du "western-spaghetti": personnages sales et pas rasés, gros plans alternés avec des plans larges, paysages d'un soleil brûlant ou d'une pluie diluvienne, violence accentuée, contexte mexicain, héros démystifiés, longs duels au pistolet, musique lancinante. L'intrigue s'inspire ici évidemment de "YOJIMBO", film de samouraïs d'Akira Kurosawa, mais Leone a su éviter le plagiat en prenant soin à ce que le dialogue de son film soit complètement différent de celui de son homologue japonais tout en allant également puiser des idées dans la pièce de Goldoni: "Arlequin, serviteur de deux maîtres". Si le ton est volontiers original de par une caméra souple aux cadrages soignés et par son héros conçu comme une abstraction ou une figure de style sans substance, on y retrouve quand même des éléments propres au western classique américain. L'importance de la trame sonore d'Ennio Morricone dans la création d'ambiance et la narration du film n'est plus à faire, tout comme le jeu extraordinaire de Clint Eastwood et de Gian Maria Volonte, qui devinrent tous deux rapidement des révélations et des vedettes. Et pourtant, cet excellent western de Leone n'était qu'une ébauche ou un prototype à côté de ce qui allait suivre. Toute personne qui ne connaît cependant pas le western à l'italienne se doit de visionner cette oeuvrette en premier lieu pour mieux apprécier le genre. Soulignons que les Américains avaient donné un nom au personnage d'Eastwood (Joe!) dans un premier doublage à l'époque: une grosse aberration!!! Mathieu Lemée

FOR A FEW DOLLARS MORE aka Et pour quelques dollars de plus aka Per qualche dollaro in più - Sergio Leone avec Clint Eastwood, Lee Van Cleef, Gian Maria Volonte, Mara Krupp, Luigi Pistilli, Klaus Kinski, Josef Egger, Panos Papadopoulos, Benito Stefanelli, Aldo Sambrell, Mario Brega, 1965, Italie, 130m

Un bandit mexicain surnommé El Indio parvient à s'évader de prison avec l'aide des hommes de sa bande. Maintenant recherchée, sa tête est mise à prix et deux chasseurs de primes aux méthodes et aux tempéraments fort différents se lancent sur ses traces. Le premier est un pistolero solitaire surnommé "L"Étranger", le second est un colonel à l'allure raffinée muni d'une artillerie faite sur mesure qui s'appelle Mortimer. Les deux hommes ne tardent pas à se croiser et malgré leur défiance mutuelle décident de collaborer ensemble pour capturer El Indio et se partager la prime. L'Étranger s'arrange pour faire parti de la bande d'El Indio qui planifie une attaque contre la banque d'El Paso. Bien que celle-ci ait été discrètement prévenue par l'Étranger du vol qui se prépare, El Indio et sa bande parviennent à réussir leur coup. Fuyant vers l'est, les bandits s'arrêtent dans un village où Mortimer se propose d'ouvrir le coffre-fort qu'ils ont dérobé. Mais à la nuit tombante, El Indio et sa bande surprennent Mortimer et l'Étranger en train de vouloir fuir avec le magot. Capturés et battus, El Indio songe à se servir d'eux comme boucs émissaires; il s'arrange pour les libérer afin qu'ils éliminent sa bande pour qu'il puisse partir seul avec le butin. Mais les deux chasseurs de primes le rejoignent après avoir descendu les autres bandits. El Indio devra affronter le colonel Mortimer en duel, celui-ci s'avérant avoir une vengeance personnelle à assouvir contre le dangereux hors-la-loi.

Pour se venger des producteurs qui ne lui ont laissé aucun bénéfice monétaire pour le succès de "A FISTFUL OF DOLLARS", Sergio Leone décida de tourner ce western au titre évocateur. Si le film se veut le second chapitre de la trilogie des "DOLLARS", Leone a poussé encore plus loin son travail sur la mise en scène. Le baroque s'y retrouve donc accentué, où un réalisme détaillé se retrouve confronté avec des moments spectaculaires, renvoyant à la fable mythologique. Des plans d'ensemble se succèdent en alternance avec des gros plans de visages envahissant l'écran de manière toujours aussi fluide et les rituels des gestes des protagonistes, avant qu'ils ne dégainent ou ne tirent, prennent beaucoup d'ampleur et d'importance, ce qui rend la présentation visuelle des personnages encore plus efficace. La musique lancinante d'Ennio Morricone a un rôle narratif plus actif que dans le western précédent de Leone, tout comme l'utilisation judicieuse des flashbacks comme moteur à la progression dramatique du récit. C'est dire que l'ensemble fonctionne comme une mécanique mise au point avec un soin minutieux. Le tout se veut plus complexe et étoffé, tant au niveau de l'illustration que de l'écriture et de la structure de l'intrigue, afin de surprendre continuellement le public. Cela ne va cependant pas sans une certaine ironie et une froideur cynique dans le ton de cette oeuvre divinement sublime. Clint Eastwood reprend son personnage de pistolero solitaire sans nom avec le même talent et le même jeu laconique. Lee Van Cleef fait une composition étonnamment élégante dans le rôle du colonel et Gian Maria Volonte met beaucoup de théâtralité dans son incarnation du bandit El Indio. Mathieu Lemée

The GOOD, THE BAD AND THE UGLY aka Le Bon, la Brute et le Truand aka Il buono, il brutto, il cattivo - Sergio Leone avec Clint Eastwood, Lee Van Cleef, Eli Wallach, Aldo Giuffre, Mario Brega, Luigi Pistilli, Rada Rassimov, Benito Stefanelli, Antonio Castale, Claudio Scarchelli, Enzo Petito,  1967, Italie - 179 minutes (montage du réalisateur) 161 minutes (version en salles)

Au cours de la guerre de Sécession, deux hommes se livrent à une activité rémunératrice: Un pistolero surnommé Blondin livre un bandit nommé Tuco aux autorités d'une ville quelconque en échange de la prime promise, puis le délivre au moment où il s'apprête à être pendu. Après avoir fait plusieurs fois cette opération, Blondin songe à quitter Tuco pour de bon lorsqu'ils découvrent tous les deux un convoi militaire où les soldats ont été massacrés. Un soldat mourant révèle à Tuco l'existence d'un trésor volé aux Confédérés caché dans un cimetière. Croyant pouvoir obtenir seul le trésor, Tuco est obligé de s'associer avec Blondin à nouveau car celui-ci a appris du mourant le nom de la pierre tombale où le trésor est caché. Chacun se voit donc forcé à épargner et à protéger la vie de son partenaire pour retrouver le butin. Un troisième homme, Sentenza, est cependant au courant de l'existence du trésor et entend bien rafler l'argent pour lui tout seul. Tout ce joli monde traverse les champs de bataille de la guerre civile, indifférents aux combats se déroulant autour d'eux, sauf lorsqu'ils n'ont pas le choix. Après plusieurs aventures et quelques tueries, les trois hommes se retrouvent au cimetière où ils devront s'affronter en "triel" pour déterminer celui qui repartira avec le trésor.

Troisième volet qui boucle admirablement la boucle de la trilogie des "DOLLARS", ce film en est également le plus accompli. Leone continue à nouveau d'élaborer son style de mise en scène baroque et syncopée déjà expérimenté dans ses deux westerns précédents. L'on retrouve donc tous les ingrédients du genre; montage alternant gros plans et plans larges, moments solennels éclatant brusquement en scènes explosives etc. où la plupart d'entre eux sont poussés à un point de perfection maniaque. Qui plus est, Leone utilise superbement les stéréotypes et les conventions du western afin de s'acharner à les démolir en jouant sur les apparences. C'est ainsi que les appellations arbitraires identifiant les trois protagonistes du film sont interchangeables. Le film possède une durée inhabituelle qui s'apparente à un concerto gigantesque où chaque personnage possède son thème musical, comme quoi la trame sonore de Morricone joue un rôle toujours plus accru dans la narration (ex. la scène du chant choral des soldats prisonniers qui vient en contrepoint à la violence des coups portés par Sentenza sur Tuco). Le contexte de la guerre de Sécession permet en plus à Leone d'y aller d'un savoureux esprit de jeu de massacre parfois surréaliste pour balayer les mensonges qui sont généralement rattachés à cette période historique au cinéma. Le film contient donc beaucoup d'humour, particulièrement dans la scène finale du "triel" magistralement étiré et dans l'incarnation du personnage de Tuco, interprété avec truculence par Eli Wallach. Eastwood et Van Cleef sont égaux à eux-mêmes dans ce chef-d'oeuvre culte monumental dont la postérité est pleinement méritée. Mathieu Lemée

ONCE UPON A TIME IN THE WEST aka Il était une fois dans l'Ouest aka C'era una volta il West - Sergio Leone avec Charles Bronson, Henry Fonda, Claudia Cardinale, Jason Robards, Gabriele Ferzetti, Paolo Stoppa, Frank Wolff, Jack Elam, Woody Strode, Lionel Stander, Keenan Wynn, 1968, Italie, 165m version française et anglaise, 171m version italienne

Morton est un constructeur de chemin de fer qui a engagé un homme de main, Frank, pour tuer un fermier et sa famille, propriétaire d'un terrain avantageux le long du parcours prévu et qui voulait y bâtir une gare et une petite ville. La veuve de la victime, une ancienne prostituée de la Nouvelle-Orléans nommée Jill et arrivée sur place après la mort de son mari et de ses enfants, songe à vendre le terrain et à quitter les lieux. Elle reçoit alors la visite d'un bandit, Cheyenne, qui est injustement soupçonné du meurtre de son mari et qui assure sa protection. Un métis inconnu et joueur d'harmonica se présente aussi pour la protéger car il est à la recherche de Frank avec qui il a un compte personnel à régler. Les deux hommes découvrent les mobiles des agissements de Morton et de Frank et empêchent ceux-ci de s'emparer du terrain appartenant à Jill. Frank se demande d'ailleurs quelle est l'identité du métis, qui ne se présente à lui que sous les noms d'anciennes victimes qu'il a tous tués. Morton en vient à trahir Frank mais il est tué par Cheyenne et sa bande. Frank se dirige donc vers son destin afin d'affronter le métis à l'harmonica en duel et de savoir enfin ce que celui-ci lui veut, pendant qu'une gare commence à se construire sur le terrain de la veuve.

Bénéficiant d'un budget imposant d'un major américain, le maître du western italien, Sergio Leone a pu avoir le privilège de tourner quelques scènes dans l'Ouest américain, à Monument Valley en particulier. Il continue à profiter de l'occasion pour prendre les symboles traditionnels du western classique afin de les traiter de manière stylisée. Cette stylisation prend néanmoins une forme différente que celle dans sa trilogie des "DOLLARS". Le temps est volontairement étiré, comme dans les films japonais, pour permettre aux principaux personnages de s'étudier longuement alors que le progrès de la conquête de l'Ouest les destine à périr en temps qu'archétypes mythologiques. La mise en scène prend donc l'allure d'un ballet de morts où les silences parlent plus que les dialogues et donnent du poids à la force de survie des protagonistes sentant qu'ils vont probablement périr. Cette pondération dans l'illustration et la cadence surprend de la part de Leone, mais il sait jouer magnifiquement avec l'attente du public grâce à des cadrages extraordinaires et des mouvements lents de la caméra qui sont comme des caresses. Avec cette méthode, Leone nous présente avec soin, sous forme de parabole, la naissance d'une nation en devenir, les difficultés de la conquête de l'Ouest, l'association peu naturelle entre le pouvoir économique et les hors-la-loi et les prémisses du matriarcat. Le ton d'humour ironique cher à l'auteur est toujours présent et le procédé du flashback fragmenté est à nouveau utilisé, mais de façon encore plus grandiose, tout comme le rôle narratif de la musique de Morricone dans la progression dramatique du récit; ces deux éléments se rejoignant et atteignant leur point culminant lors du magnifique duel final. La distribution est dominée par un quatuor d'acteurs dans des rôles caractéristiques inhabituels pour le genre. Charles Bronson joue un vengeur taciturne avec toute sa présence et sa force de marbre, Henry Fonda compose avec classe et perfectionnisme son seul rôle de méchant en carrière, Claudia Cardinale illustre avec talent le courage retenu de son personnage tout en étant ravissante et Jason Robards réussit à merveille son incarnation d'un bandit à la fois malin et empli d'une douceur romantique. Un film touchant qui est un chef-d'oeuvre inoubliable. Mathieu Lemée

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