"La Nuit La Plus Culte", le retour !

par Stelvio


Je vous livre mon petit reportage en forme de debriefing de la deuxième "Nuit la plus culte", avec en invité d'honneur le "Sam Peckinpah Italien", le "maître du ralenti" dit Slo-Mo Enzo, j'ai nommé Enzo G. Castellari.

Arrivé sur place une bonne heure avant le coup d'envoi des festivités, prévu à 19 heures 30, je retrouve d'abord ce cher akton, venu de par delà les étoiles hostiles pour mettre la dernière main à l'organisation. Nikita de l'excellentissime site nanarland.com est là, fidèle au poste, flanqué du fameux Mr. Klaus, dont je fais la connaissance. Nous admirons les superbes affiches de films de Castellari disposées pour l'occasion dans le hall du cinéma. L'effervescence de la première "Nuit la plus culte", qui reçut en février dernier Luigi Cozzi et Caroline Munro, n'est pas tout à fait au rendez-vous. Le public, peut-être soucieux de profiter de cette belle journée d'"été indien", prend son temps. Les salles se rempliront néanmoins peu à peu, jusqu'à parvenir à une convenable affluence en cours de nuit. Parallèlement à la mini-rétrospective Castellari, sont également organisées des séances spéciales consacrées à Marlon Brando et à Steven Spielberg. Ce dernier n'est malheureusement pas présent, à ma grande déception... Non, je déconne ! Je fantasmais simplement en secret à l'idée d'enfermer de force le golden boy d'Hollywood dans la salle pendant la projection de LA MORT AU LARGE. Histoire de lui montrer qui c'est Enzo... Castellari bien sûr, pas le gugusse interprété par Jean Réno dans le GRAND BLEU, ce morne navet subaquatique, mais je m'égare.

Donc, Franco Nero n'a pu se libérer de son tournage, et Enzo Castellari a raté son avion, et n'arrivera que par le vol suivant. La projection du premier film, KEOMA, commence donc sans lui. Vers le milieu du film, un frémissement est perceptible, les têtes se tournent. Escorté dans l'obscurité de la grande salle du cinéma Georges-Méliès de Montreuil par l'un des gentils organisateurs de cette "Nuit la plus culte", deuxième du nom, le maestro Castellari prend place, accompagné de son épouse et d'une interprète. A l'issue de la projection de KEOMA, le cinéaste gênois a obtenu l'ovation méritée. Oui, KEOMA fait bien partie des sommets du genre. Oui, le talent de metteur en scène de Castellari, son sens inouï du cadre et du décor, apparaît mieux sur grand écran.

Dès les présentations faites et l'ovation retombée, commence une petite heure de discussions nourries. "On va voir TE DEUM ?", demande rapidement Castellari inquiet. Les organisateurs le rassurent immédiatement en détaillant la suite du programme : "Heureusement, car ce n'est vraiment pas ce que j'ai fait de mieux !" A propos de ses films, le maestro a sa hiérarchie. Au sommet de celle-ci figure KEOMA. Sans l'ombre d'une hésitation : "Le western est mon genre préféré, et KEOMA est le film dont je suis le plus fier !"

Et de détailler la genèse de l'œuvre : "Nous sommes partis d'une idée de Luigi Montefiori, mais le film a été écrit au jour le jour. Chaque soir, nous nous réunissions pour échanger nos idées et préparer le tournage du lendemain. KEOMA est un film-somme, inspiré de tous les films que j'avais aimé... mais réinterprétés à ma façon ! Par exemple, la rencontre avec cette allégorie de la mort constitue ma citation du SEPTIÈME SCEAU d'Ingmar Bergman. Quant au discours prononcé après la mort du père, il m'a été inspiré par la composition de Marlon Brando en Marc-Antoine, dans le JULES CÉSAR de Mankiewicz. Mais malgré cette conception au jour le jour, le film peut être perçu comme homogène".

Mais KEOMA ne sonna t-il pas le glas du western-spaghetti ? Le metteur en scène n'en doute guère : "Le grand succès remporté par le film a pu faire penser à une renaissance. En réalité, il s'agissait davantage d'un chant du cygne pour le genre." Woody Strode, grand acteur des films de John Ford, servant en quelque sorte de témoin, de pont entre deux générations de metteurs en scène : "Je voulais absolument qu'il participe à mon film, peu importe le rôle", confirme Castellari, dont les souvenirs affluent : "Woody me demandait toujours ce qu'il aurait à faire le lendemain. Je lui répondais toujours que je ne savais pas... Mais Woody Strode appréciait bien de tourner avec nous. Le dernier jour, il m'a fait le plus beau compliment qui soit, en me disant que je lui rappelais John Ford. C'est mon Oscar à moi !", s'exclame le maestro.

La discussion, sans temps morts, se poursuit. On évoque l'aspect christique du personnage de Kéoma (un aspect apparu après coup à Castellari), l'importance du rapport filial dans ses films et son amour pour le western. Quant à la musique des frères Guido et Maurizio De Angelis, qui évoque certains titres de Lee Hazlewood, Castellari la juge très réussie... dans son genre : "Les frères De Angelis ont réinterprété les motifs de Bob Dylan et de Leonard Cohen que je leur avais suggéré, ça "colle" bien à l'atmosphère du film".

Questionné à propos de la fin "ouverte" et un rien elliptique de KEOMA, Castellari révèlera qu'il s'agissait de laisser la porte ouverte à une éventuelle suite... qui ne verra jamais le jour.

Pourtant, le western pourrait bien voir Castellari faire à nouveau parler la poudre sur grand écran. Où l'on reparle du fameux projet de nouveau long métrage... Annoncé à plusieurs reprises, ce retour en salles a fini par ressembler à un serpent de mer. Cette fois, c'est la bonne, si l'on en croit Castellari himself : "Cela va se faire l'année prochaine, enfin ! Cela fait 9ansque je cherche à le réaliser, ce film. A l'origine du projet, en 1996, tous les acteurs "historiques" du western spaghetti devaient en être. Heureusement qu'on ne l'a pas fait, car le casting sera meilleur !", assène le cinéaste qui ne veut (ou ne peut ?) trop en dire. Et de lever un petit coin du voile : "Plusieurs acteurs américains se sont passé le mot. John Landis, Dario Argento et même Quentin Tarantino feront des apparitions".

Tarantino, justement, a souvent cité Enzo G. Castellari au rang de ses influences. Mieux, le surdoué américain a profité d'une "carte blanche" lors de la Mostra de Venise pour lui rendre hommage. "J'ai passé quatre jours à Venise avec ce "mauvais garçon", explique affectueusement Castellari. "Vous savez qu'il va tourner un remake d'INGLORIOUS BASTARDS (UNE POIGNEE DE SALOPARDS en français ndlr). La première scène sera d'une inventivité incroyable, jamais vue dans un film d'action américain !"

Découvrir sur grand écran le film est une heureuse surprise. Castellari est resté parmi le public pour présenter son film. "Une loi anti-terroriste venait d'être votée en Italie, l'usage des armes à feu était totalement banni dans la péninsule. Nous avons tenté d'aller tourner en Yougoslavie, mais c'était trop compliqué. Finalement, j'ai eu l'idée d'utiliser des contrefaçons. Aucun coup de feu n'a été tiré durant le tournage, ce qui m'a forcé à être plus inventif, et plus "acrobatique"...", révèle le cinéaste.

Les rires fusent régulièrement, les trognes de Bo Svensson et Fred Williamson font leur effet, de même que les nombreuses scènes "pétarado-pulvérisantes" ordonnancées par le maestro. On comprend mieux pourquoi Tarantino a tant apprécié ce film. "C'est l'un des meilleurs films de guerre italiens", m'assure Nikita, dont je ne peux que partager l'avis.

La suite de la soirée se partage entre projections et discussions, autour du buffet mis en place par les organisateurs, décidément très prévenants. Je quitte le Méliès en compagnie d'Akton (encore merci l'ami !) après la projection du TÉMOIN A ABATTRE, que je trouve décidément très surfait. Seul petit bémol d'une magnifique soirée, qui, décidément, en appelle bien d'autres ! Stelvio

la Nuit la plus culte 1 : Luigi Cozzi

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ENZO CASTELLARI

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